Gaël M.

Conseillé par (Libraire)
9 janvier 2020

Un éblouissant roman

Il y a des romans comme ça qui vous arrache des larmes et un sourire un soir, très tard, sous la pleine lune. Des histoires qui vous prennent au corps et qui vous disent que c’est pour elles que vous faites ce métier.
« Là où chantent les écrevisses » de Delia Owens, sous la traduction de Marc Amfreville, en fait indéniablement partie.

Tout commence et tout finit dans le marais, le bayou.
« Un marais n’est pas un marécage. Le marais, c’est un espace de lumière, où l’herbe pousse dans l’eau, et l’eau se déverse dans le ciel. Des ruisseaux paresseux charrie t le disque du soleil jusqu’à la mer, et des échassiers s’en envolent avec une grâce inattendue -comme s’ils n’étaient pas faits pour rejoindre les airs- dans le vacarme d’un millier d’oies des neiges. »
Voilà, Delia Owens vous prend dans sa poésie, et l’intensité de ce lieu, pour ne plus vous lâcher jusqu’à la toute dernière page.

Nous sommes en 1969 lors qu’est découvert le corps de Chase Andrews dans un marécage. Tout porte à croire à une simple chute du haut de cette vieille tour de guet. Mais l’absence totale de traces ou d’empreintes sème le doute dans l’esprit d’ Ed Jackson, le shérif de cette bourgade du Sud profond. L’ enquête démarre donc, au rythme des plats et des saveurs typiques de la Louisiane qui défilent lors des conciliabules entre Ed et son adjoint.
Parallèlement à cette histoire, une autre débute en Août 1952, au sein du marais. Une petite fille voit partir sa mère au bout du chemin. Elle essaye tant bien que mal de se dire qu’elle reviendra… un jour.

C’est ainsi que commence l’histoire de Kya, se déroulant au milieu des oiseaux, des plantes sauvages, de la violence d’un père alcoolique, des abandons, des belles rencontres, des amibes, des remarques assassines, des hérons, des crabes, des amours.

Avec un sens du rythme et de la formule, Délia Owens nous transporte fabuleusement dans son univers. J’y ai plongé mon regard et n’ai plus eu envie d’en ressortir, absorbée par ce personnage féminin fort, dense et magnifique.
Le marais devient la mère nourricière de Kya, il lui donne, la nourrit, l’inspire, la fait grandir, la confronte tandis que le monde autour observe cette « Fille des marais » méfiante et craintive qui a le goût de cette solitude immense, parfois forcée, parfois voulue.

Kya vit, palpite et Owens nous tatoue à l’esprit la beauté sombre du bayou et de son enfant. C’est cela la force d’un grand roman : ce tissage sensible entre personnages, ambiance, écriture et nous, lecteurs-trices happé(e)s.

« Là où chantent les écrevisses » (« Where the Crawdads Sing ») est un chant d’amour pour les marais de Louisiane, c’est aussi une enquête qui vous surprendra par son amplitude. Comme un éblouissant roman polymorphe.

Conseillé par (Libraire)
22 décembre 2019

En 1953, devant la caméra du réalisateur Pierre Viallet, dans un bistrot parisien, Blaise Cendrars parle de Modigliani. Au détour de la conversation, il sort cette petite phrase: « Et son plus beau nu, il l’a fait avec une petite Irlandaise qui était moche comme un sang de punaise, mon vieux, celle qui passe sa liquette… elle est magnifique ».

Cette réplique va piquer la curiosité d’Alain Emery, et sera à l’origine de son dernier livre Tant espérer des nuits (ed. La Gidouille).

Qui était cette « petite Irlandaise »? Et de quel tableau parle t-il?

Avec la qualité d’écriture qu’on lui connait, l’ironie fine et parfois caustique qu’il manie à merveille et la tendresse qu’il peut avoir pour ses personnages, Alain Emery fait revivre le Paris de l’époque, celui de Montmartre et du Bateau-Lavoir puis celui de Montparnasse. Il donne vie à cette jeune femme oubliée, cette petite Irlandaise anonyme qu’il imagine « sourire devant cette petite merveille qui la représente, sans qu’aucun ne la reconnaisse ».

« Ce qu’elle est devenue, cette fameuse toile à présent, en ce 17 décembre 1953, la petite Irlandaise n’en sait sans doute rien. Peut-être n’y a t-il qu’un Cendrars pour s’en soucier, pour n’avoir oublié ni le peintre ni son modèle. »

Une nouvelle petite perle signée Alain Emery.

Conseillé par (Libraire)
22 décembre 2019

En 1953, devant la caméra du réalisateur Pierre Viallet, dans un bistrot parisien, Blaise Cendrars parle de Modigliani. Au détour de la conversation, il sort cette petite phrase: « Et son plus beau nu, il l’a fait avec une petite Irlandaise qui était moche comme un sang de punaise, mon vieux, celle qui passe sa liquette… elle est magnifique ».

Cette réplique va piquer la curiosité d’Alain Emery, et sera à l’origine de son dernier livre Tant espérer des nuits (ed. La Gidouille).

Qui était cette « petite Irlandaise »? Et de quel tableau parle t-il?

Avec la qualité d’écriture qu’on lui connait, l’ironie fine et parfois caustique qu’il manie à merveille et la tendresse qu’il peut avoir pour ses personnages, Alain Emery fait revivre le Paris de l’époque, celui de Montmartre et du Bateau-Lavoir puis celui de Montparnasse. Il donne vie à cette jeune femme oubliée, cette petite Irlandaise anonyme qu’il imagine « sourire devant cette petite merveille qui la représente, sans qu’aucun ne la reconnaisse ».

« Ce qu’elle est devenue, cette fameuse toile à présent, en ce 17 décembre 1953, la petite Irlandaise n’en sait sans doute rien. Peut-être n’y a t-il qu’un Cendrars pour s’en soucier, pour n’avoir oublié ni le peintre ni son modèle. »

Une nouvelle petite perle signée Alain Emery.

Conseillé par (Libraire)
25 octobre 2019

Un des plus grands romanciers espagnols

Ce n’est que mon deuxième roman de Javier Marias, après Comme les amours (Gallimard, 2013), mais je le considère déjà comme l’un de mes auteurs préférés!
Berta Isla est de ces romans qui semblent parfaits. L’écriture est sublime (et nous, lecteurs français, devons beaucoup à la traductrice Marie-Odile Fortier-Masek), l’intrigue est captivante, le suspense subtilement distillé, et l’intime est habilement mêlé à la grande Histoire, entre l’Espagne et l’Angleterre de la fin des années soixante jusqu’aux années deux mille.
Les thèmes abordés nous interrogent tout au long de la lecture, et l’on quitte avec regret Berta et Tomas, dont nous aurons suivi le destin sur près de six-cent pages.

Conseillé par (Libraire)
13 septembre 2019

Joyce Carol Oates au sommet!

Une fois de plus je suis soufflé!!

Joyce Carol Oates est une romancière époustouflante, prodigieuse, phénoménale!

Plus de cinquante ans d’écriture, et plus d’une cinquantaine de romans publiés (je ne compte même pas les recueils de nouvelles!). A chaque livre, une densité rare, une grande profondeur, souvent d’une qualité littéraire digne du Nobel (qui sait ?)

Joyce Carol Oates interroge nos sociétés, scrute la mécanique intime au cœur des problématiques sociétales d’aujourd’hui, et refuse la simplification hâtive qui trop souvent conduit à une compréhension étriquée du monde dans lequel nous vivons.

Dans Un livre de martyrs américains (éditions Philippe Rey), Joyce Carol Oates aborde un sujet qui divise: l’avortement. A la fin des années 90, dans une petite ville au cœur du Midwest, un père de famille, charpentier, fondamentaliste chrétien, abat un médecin avorteur devant la clinique où il exerce. Pour les familles, leurs femmes, leurs enfants, comment réagir et continuer à vivre après un tel drame? Comment se construire un avenir qui ne soit enchaîné au passé? Qui sont véritablement les nouveaux martyrs américains?

Le sujet ne peux laisser personne indifférent. Et loin de prendre parti, Joyce Carol Oates laissera le lecteur cheminer avec Naomi, Darren, Edna Mae, Dawn, Melissa, Jenna…

Remarquable et nécessaire.

Gaël