Le droit et les juifs. En France depuis la Révolution, En France depuis la Révolution
EAN13
9782247079377
ISBN
978-2-247-07937-7
Éditeur
Dalloz
Date de publication
Collection
À savoir
Nombre de pages
288
Dimensions
12 x 8 cm
Poids
84 g
Langue
français
Code dewey
342.44
Fiches UNIMARC
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Le droit et les juifs. En France depuis la Révolution

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01Le droit et les Juifsen France depuis la RévolutionDanièle Lochak© Éditions Dalloz, 2009SOMMAIREINTRODUCTIONI. – L'ÉMANCIPATION : LE MOMENT RÉVOLUTIONNAIRE
(textes 1 à 7)II. – LA MARCHE ENTRAVÉE VERS L'ÉGALITÉ ET L'INTÉGRATION : de l'Empire à la IIIe République
(textes 8 à 18)III. – EXCLUSION, SPOLIATIONS, PERSÉCUTIONS : le droit antisémite de Vichy
(textes 19 à 53)IV. – UNE RÉINTÉGRATION INACHEVÉE : le rétablissement de la légalité républicaine
(textes 54 à 59)V. – LA LUTTE CONTRE L'ANTISÉMITISME : de la répression du racisme à la pénalisation du négationnisme
(textes 60 à 70)VI. – LA RÉPARATION DIFFÉRÉE DES CRIMES DE VICHY : procès, mémoire, indemnisation
(textes 71 à 78)VII. – LA REVENDICATION D'EXCEPTIONS À LA LOI COMMUNE : les impératifs de la liberté religieuse
(textes 78 à 86)BIBLIOGRAPHIEINTRODUCTION De prime abord, la conjonction des deux termes : « le droit » et « les Juifs » peut surprendre, voire choquer. Spontanément, en effet, on a tendance à penser que, depuis la Révolution française qui a fait des Juifs des citoyens comme les autres – et exception faite de la période de Vichy, cette « sombre parenthèse » dans l'histoire de la République – le droit n'a que faire de la qualité de Juif à laquelle ne sauraient être attachées de conséquences juridiques. Le droit est et doit rester « aveugle » aux différences : d'origine, de religion, a fortiori de « race ».La conception traditionnelle des droits de l'homme, celle de la Révolution française, est en effet fondée sur le postulat que tous les hommes ont les mêmes droits, que ces droits sont les mêmes pour tous, transcendant les appartenances singulières. La loi ignore ces appartenances et l'universalité de la règle est gage d'égalité.La réalité est moins simple et force est de constater que les Juifs, non seulement ont été, à certaines époques, appréhendés en tant que tels par le droit mais qu'ils peuvent l'être encore aujourd'hui, dans un contexte qui n'est plus caractérisé par l'oppression et la persécution.Sous l'Ancien Régime, les Juifs formaient un groupe singulier, doté d'un statut juridique à part et discriminatoire. Une fois réalisée l'émancipation des Juifs par la Constituante, en 1791, il a fallu encore un demi-siècle pour que disparaisse l'ensemble des discriminations dont ils faisaient l'objet. Jouissant alors d'une pleine égalité, intégrés au corps de la nation, juridiquement assimilés, ils sont devenus totalement invisibles dans la loi.Mais cette égalité difficilement acquise n'a pas fait disparaître les préjugés et les attaques dont ils sont l'objet : l'affaire Dreyfus témoigne paradoxalement à la fois de l'intégration réussie des Juifs – Dreyfus a pu devenir officier dans l'armée française – et de la virulence de l'antisémitisme. Et cette égalité a volé en éclats sous Vichy, lorsqu'une profusion de textes articulés autour du tristement célèbre « Statut des Juifs » a organisé la mise à l'écart des Juifs. Cette visibilité qui leur a été à nouveau accordée atteste a contrario du lien qui unit l'égalité en droit et l'invisibilité dans la loi.Avec le rétablissement de la légalité républicaine, en 1944, et l'abrogation de l'ensemble de la législation antisémite de Vichy, le mot « Juif » a été de nouveau effacé des textes.Les Juifs vont pourtant, par la suite, réapparaître dans le droit. D'abord comme victimes potentielles de l'antisémitisme, lorsque le législateur décide de renforcer la répression du racisme sous toutes ses formes puis de lutter de façon spécifique contre le négationnisme. Ensuite, en tant que victimes de Vichy, habilitées à obtenir réparation tant sur le plan symbolique que matériel, lorsque, de longues années plus tard, intervient la reconnaissance de la spécificité des crimes commis à l'égard des Juifs. Enfin, en tant que pratiquant une religion minoritaire et revendiquant au nom de la liberté de conscience des exceptions à la loi commune lorsque celle-ci est incompatible avec les contraintes de la religion juive.Par conséquent, la visibilité des Juifs dans la loi et plus généralement dans le droit ne correspond plus, aujourd'hui, à leur mise à l'écart, encore moins à la volonté de les maintenir dans une situation d'infériorité. Elle doit s'analyser comme le résultat d'une prise de conscience des effets potentiellement discriminatoires de l'application uniforme de la même règle à tous lorsque celle-ci, par sa rigidité, empêche certains individus, en raison de leur appartenance à un groupe minoritaire, de la possibilité d'exercer effectivement des droits théoriquement reconnus à tous. Pour atteindre l'idéal universaliste et garantir l'égalité des droits à tous les individus par-delà leurs différences, pour les protéger contre les discriminations directes ou indirectes, le droit est amené à prendre en compte ces différences au prix du renoncement à la formulation universaliste de la règle.I. – L'émancipation :
le moment révolutionnaireLes Juifs sous l'Ancien RégimePendant plusieurs siècles, la situation des Juifs dans le royaume est restée entièrement précaire, rythmée par les mesures d'expulsion alternativement décrétées puis rapportées au gré des caprices des souverains et de leurs besoins financiers. Ainsi, Philippe Auguste, après avoir ordonné la confiscation de leurs biens (1181), chasse les Juifs du Royaume (1182) avant de les rappeler seize ans plus tard. En 1306 un nouvel édit d'expulsion est pris par Philippe le Bel, là encore après avoir saisi les biens des Juifs au profit de la Couronne. En 1315, les Juifs sont rappelés pour une période de douze ans, mais en 1322 ils sont à nouveau bannis par Philippe V. En 1359 le futur Charles V négocie le retour des Juifs moyennant une contribution destinée à payer la rançon de son père Jean le Bon, prisonnier des Anglais. En 1380 l'autorisation de séjour est renouvelée pour vingt ans mais en 1394 Charles VI abroge l'autorisation de séjour des Juifs, qui quittent le royaume.L'édit d'expulsion de 1394 restera durablement en vigueur et il sera encore confirmé en 1615 par Louis XIII : les Juifs ne peuvent donc séjourner dans le royaume que sur la base d'autorisations individuelles et temporaires.Le sort des Juifs est différent dans les régions périphériques, rattachées tardivement au royaume, où leur présence est tolérée : dans le Sud-Ouest, où résident les « Juifs portugais », et dans l'Est, en Alsace et en Lorraine.Les « Juifs portugais » sont les descendants des Juifs expulsés d'Espagne en 1492 et qui se sont fixés au Portugal jusqu'à ce que l'Inquisition les en chasse. Installés dans la région de Bordeaux, ils bénéficient de lettres patentes royales en tant que « nouveaux chrétiens », bien qu'en réalité ils continuent à observer en privé les rites du judaïsme. Au XVIIIe siècle, ils recommencent à afficher leur appartenance au judaïsme et en 1723 les lettres patentes sont renouvelées non plus aux « Portugais » de Bordeaux et Auch mais « aux Juifs desdites généralités connus et établis en notre royaume sous les titres de Portugais autrement Nouveaux Chrétiens et ceux qui dans la suite pourront s'y retirer et habiter ». En 1776 Louis XVI reconnaît aux Juifs de Bordeaux le droit de s'installer dans tout le royaume, y compris à Paris, où une communauté portugaise se développe.En Lorraine, l'expulsion des Juifs a été ordonnée en 1477. Mais après l'occupation par la France de Toul, Verdun et Metz, quelques Juifs sont autorisés à s'installer à Metz, en 1574, par des lettres patentes de Henri III, pour pratiquer le prêt sur gages. Les « privilèges » des Juifs de Metz seront confirmés par Henri IV puis à nouveau en 1718, et le nombre de ménages autorisés à résider dans la ville sera progressivement augmenté. À Metz et dans le pays messin, on assiste donc à la légalisation définitive de la présence juive, moyennant le paiement d'une taxe annuelle d'un montant très élevé. Les communautés de Nancy et de Lunéville, rattachées à la France en 1766, connaissent toutefois un sort plus favorable.Lors du rattachement d'une importante partie de l'Alsace au Royaume, en 1648, l'édit d'expulsion de 1394 n'y est pas appliqué. En 1674 est édicté un statut des Juifs alsaciens, calqué sur celui des Messins : les Juifs d'Alsace...
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