• 30 mai 2020

    Un texte puissant, poignant et sensible

    C’est sur les bancs de l’université que Kate et Max se sont rencontrés. Très vite, leur complicité s’est muée en une amitié profonde. Kate qui a grandit seule aux côtés d’une mère qui lui est désormais étrangère découvre auprès de Max, une famille aisée et cultivée qui l’attire. Zara surtout (la mère de Max), une réalisatrice réputée, la fascine.
    Kate est vite adoptée par cette bruyante tribu qui recèle pourtant bien des fragilités. Inséparables, les deux amis vont faire ensemble leurs premières expériences: les fêtes, l’alcool, la drogue, les voyages et les films qu’ils dévorent. Un appétit insatiable de vivre et d’expérimenter jusqu’à ce jour où le rouge n’est plus une couleur pour Kate car il est devenu le symbole, le fil qui la relie au viol dont elle a été victime. Pas un viol par un inconnu dans une sombre ruelle, mais un viol
    bourgeois, dans une maison amie par un membre de la famille de Max. Un viol parce qu’elle a dit non et que ce non n’a pas été entendu, un viol qui sidère, brise l’élan d’une jeune femme et la propulse dans le silence.
    Rosie Price, jeune prodige de la littérature britannique, restitue avec beaucoup de justesse et de subtilité la prison intime dans laquelle son héroïne est désormais recluse. Après le silence viendront quelques mots comme des indices semés çà et là, difficilement compréhensibles par l’extérieur, les scarifications et la violence qu’elle s’inflige pour expier. Un texte puissant, poignant et sensible, indéniablement un grand roman sur la mémoire traumatique servi par la traduction brillante de Jakuta Alikavazovic.